29.4.13

Analyse 7 (2013). La Corée du Nord aurait-elle sauvé le régime de Bachar ?


Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 29 avril 2013
                                                              
La Corée du Nord aurait-elle sauvé le régime de Bachar ?

Ces jours-ci, des informations contradictoires circulent sur la Syrie, le régime de Bachar Al-Assad et la rébellion syrienne. Pourtant, une chose est sûre : «Les Grands de ce monde regardent ou règlent des comptes en Syrie(1) Nous insistons en particulier sur l’aspect «règlement de comptes», opposant les puissances occidentales (Etats-Unis, France, Grande Bretagne- Allemagne) à celles orientales (Russie, Iran, Chine).

Or, la rébellion, installée au nord de la Syrie et à la frontière turque, a commencé à s’essouffler. «D’abord parce que le nord de la Syrie est devenu une sorte de Far West où les rebelles passent plus de temps à se filmer qu’à combattre», explique un « bon connaisseur du dossier ». (2) Cette citation prouve l’impasse dans laquelle se trouve la rébellion syrienne qui, pour de multiples raisons militaires, tactiques ou politiques (émiettement des rebelles et de leurs soutiens), est à bout de souffle.

Profitant de la lassitude de la rébellion, l’armée syrienne a commencé à regagner du terrain. L’armée syrienne a « notamment desserré le siège de la base de Wadi Deif, un site d’une importance stratégique, sur la route entre Damas et Alep. En mars, l’armée régulière avait aussi repris le quartier de baba Amr, à Homs, un bastion de la rébellion(3)

Sur fond de rivalité entre les serviteurs de l’Occident au Moyen-Orient (la Turquie d’une part et l’Arabie saoudite, la Jordanie et le Qatar d’autre part), un changement de tactique s’imposait. Ainsi, « un plan pour relancer l’insurrection à partir de Deraa (une localité proche de la frontière jordanienne) a été élaboré (par qui ?), et sa mise en œuvre a débuté. » écrivait Benjamin Barthe, journaliste au quotidien Le Monde (Le Monde du 20 avril 2013).

Les détails du plan donnent l’envergure de l’implication américaine dans l’opération : 4000 combattants, hommes de confiance de l‘Occident, ont été sélectionnés, équipés et formés dans ce nouvel esprit. (2) «Des avions croates, les soutes pleines d’un arsenal financé par Riyad » (2) ont acheminé des canons sans recul, lance-grenades, missiles antichars, à Amman, capitale de Jordanie.

C’est sans compter sur la détermination des Russes qui ont vite compris les dangers du changement de tactique américaine. Un large front antisyrien constitué d’Israël, de Jordanie et de l’Arabie saoudite, viendrait rapidement à bout du régime syrien, encerclé, voire attaqué, pourquoi pas, par Israël qui n’a pas hésité à bombarder récemment un convoi militaire syrien à la frontière libanaise.

Pris à la gorge, les Russes ont mis le « couteau nord coréen » sur la gorge des Etats-Unis qui n’ont pas tardé à reculer (Voir analyse 6 (2013)).

L’échec, sous pression russe, du projet américain a probablement conduit le chef des rebelles syriens à démissionner vite, remplacé par un autre pion.

Rassurée, l’armée syrienne est passée à l’offensive et tente de récupérer Qoussair, une localité stratégique à la frontière nord du Liban. (4)

La livraison récente de dix milliards de dollars d’armes aux serviteurs des Etats-Unis au Moyen-Orient, « dont près de la moitié consacré à l’achat par les Emirats de vingt-cinq avions de chasse F-16 » (5) faisait-elle, entre autre, partie du plan américain consistant à lancer une offensive par le sud contre le régime de Bachar Al-Assad ? En effet, le renforcement du potentiel militaire de l’Arabie saoudite et de l’Emirat, pousserait l’Iran à immobiliser une partie importante de son armée près des côtes du Golfe Persique, l’empêchant de fournir une aide conséquente au régime syrien. La question mérite d’être posée.

Alain Frachon relève bien, que « l’enjeu de cette guerre va bien au-delà d’un changement de direction politique à Damas » (1) Le reste de la chronique porte le sceau de la composition du «Conseil d’administration» du quotidien Le Monde, composé en particulier de Bernard Henri Lévy (BHL) et d’Alain Minc. Voici ce qu’on y lit en guise de conclusion : «Chinois et Russes portent la plus grosse part de responsabilité (…) en soutenant Damas, ils empoisonnent l’Occident. » CQFD ! Comme d’habitude, le cœur de la « confession » est noyé dans une litanie de «lutte contre l’islamisme» ou d’«aide aux réfugiés» : des larmes de crocodiles pour noyer le poisson.


(1)  Chronique d’Alain Frachon- Le Monde du 26 avril 2013.
(2)  Benjamin Barthe- Le Monde du 20 avril 2013.
(3)  Benjamin Barthe- Le Monde du 19 avril 2013.
(4)  Laure Stephan- Le Monde du  24 avril 2013.
(5)  Laurent Zecchini- Le Monde du 24 avril 2013.

11.4.13

Analyse 6 (2013)


Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 11 avril 2013

cpjmo@yahoo.fr                
                                              
La Syrie, l’Iran et la Corée du Nord

La grande obsession des Etats-Unis est la création du «Grand Moyen-Orient», un objectif dont la réussite assurerait aux Etats-Unis l’hégémonie planétaire. Le Liban et la Syrie représentent deux «verrous» qui stoppent, pour l’instant, le rêve américain.

Aux yeux des Américano-israéliens, le Liban paraît le «maillon faible» desdits «verrous». Pourtant, plusieurs tentatives militaires israéliennes, dont la dernière en 2006, n’ont pas réussi à casser le «verrou» libanais. Bien au contraire. Après chaque aventure militaire israélienne, c’est le Hezbollah qui est sorti renforcé, jusqu’à devenir un pilier de défense de la souveraineté politique et territoriale du Liban.

La pression exercée par l’Occident a poussé la Syrie hors du Liban, sa «profondeur stratégique». L’avènement du «printemps arabe» a offert l’occasion à l’Occident de cibler le régime syrien, dictatorial et contesté par le peuple. En effet, la voie de Téhéran passe par Damas ; sa chute dans l’escarcelle de l’Occident fragiliserait Téhéran qui, encerclé, ne résisterait pas longtemps aux provocations de l’Occident à ses frontières et à l’assaut final sur le régime.

Les insurgés syriens, conseillés par les services occidentaux (américains, français, allemands et turcs) essayent d’isoler l’armée syrienne, en s’attaquant aux postes frontières et en coupant ses routes de ravitaillement. Pour le moment, la liaison n’est pas coupée avec le Liban.

Tout porte à croire que les Etats-Unis sont en train de passer à la vitesse supérieure et manifestent un activisme débordant au Moyen-Orient. Leurs alliés régionaux en font autant. Lors de son voyage en Israël du 20 au 23 mars derniers, Barack Obama a réussi à ressouder les liens israélo-turcs. En effet, comme l’exigeait Ankara, Benyamin Nétanyahou a présenté ses excuses à Ankara, trois ans après l’assaut sanglant du «Mavi-Marmara» et les deux pays-soutiens des insurgés syriens- ont fait un grand pas vers le rétablissement de relations diplomatiques. (1) L’Etat d’Israël, si intransigeant, dédommagera même les familles des victimes de l’assaut israélien contre le «Mavi-Marmara» (2) Sous le patronage de l’Arabie saoudite et du Qatar, le siège de Damas à la Ligue arabe-organisme sans pouvoir- a été donné à l’opposition syrienne. (3)

Le voyage de Barack Obama a été suivi de celui de son secrétaire d’Etat des 7 et 8 avril. Dans la ligne de mire : Téhéran, via Damas.

Perspective apocalyptique pour Téhéran, Moscou, Pékin, New Delhi, Rio de Janeiro, que la victoire des Etats-Unis en Syrie, suivie de l’écrasement du Hezbollah et de la mainmise américaine sur l’Iran. Plus aucun pays ne serait à l’abri des dictats de l’Oncle Sam, maître du monde.

La presse occidentale associe le voyage des dirigeants américains au conflit israélo-palestinien. Or, la Palestine de Mahmoud Abbas ne pèse d’aucun poids dans la balance géopolitique américaine. Pour les Etats-Unis, comme pour Israël, la Cisjordanie est un «territoire» comme le Golan, repris lors d’une guerre à l’«ennemi arabe». La colonisation en Cisjordanie continuera, comme elle continue dans d’autres territoires arabes, conquis par l’armée israélienne. Ce qui a été conquis par la guerre ne sera cédé que par la guerre.

Pour manifester la détermination et marquer les limites territoriales d’intérêt géostratégique de la Russie, le Kremlin envoie ses navires de guerre en Méditerranée, aux abords de la Syrie. Or, tout porte à croire que ces manifestations de force n’impressionnent guère les Etats-Unis, pressés d’en finir avec le régime de Bachar Al-Assad.

Par ailleurs, c’est une constante pour la Russie de rappeler aux Etats-Unis qu'elle est présente en Asie du Sud-est et capable de porter des coups aux intérêts américains dans cette partie précise du monde, si nécessaire. En effet, les intérêts américains en Asie du Sud-est sont tout-à-fait considérables. Le Japon constitue la troisième puissance économique mondiale. Le Japon, la Corée du Sud et les voies de navigation, par où transitent quelques 50 000 navires de commerce, sont désormais à la portée des missiles nord coréens. En cas de guerre, ne serait-ce que de courte durée, les dégâts causés par la Corée du Nord à l’économie mondiale peuvent être immenses pour les intérêts américains, occidentaux et les finances mondiales.

Le Kremlin, Damas, Téhéran, Pyongyang, unis dans leur combat contre l’empire américain. Comment réagiront les Etats-Unis ? L’évolution de la situation dans la péninsule coréenne montrera si les Etats-Unis ont fini par mettre de l’eau dans leur vin syrien.


(1)  Guillaume Perrier- Le Monde du 24-25 mars 2013.
(2)  Laurent Zecchini- Le Monde du 27 mars 2013.
(3)  Dernières Nouvelles d’Alsace du 26 mars 2013.

8.4.13

Analyse 5 (2013)


Paix et Justice au Moyen-Orient
STRASBOURG, le 8 avril 2013

                 
Le conflit israélo-palestinien revu par Alain Frachon

A lire Alain Frachon, chroniqueur du quotidien Le Monde, on se croit rêver. En effet, il a publié une chronique dans Le Monde du 29 mars qui dépeint un Obama, envahi d’ignorance, d’indécision et d’inconséquence politique au sujet du conflit israélo-palestinien.

Selon Alain Frachon, «avec Barack Obama, c’est plutôt un mélange de bonnes paroles et d’attentisme (…) l’Amérique y affiche aujourd’hui un profil plus discret. Elle hésite à s’y impliquer (…) elle est moins sûre d’elle».

Nous avons donc affaire à un Obama et à une Amérique affichant un «profil discret», «hésitants à s’impliquer» ! Quelques lignes plus loin, Alain Frachon «oublie» ses observations (il n’a peut-être pas relu son analyse ?), parce qu’il écrit : «Jamais les deux pays [Etats-Unis et Israël] n’ont entretenu une relation militaire aussi étroite que sous Obama

Alors, où est l’«hésitation», le «profil discret» et le manque d’«assurance» dont ferait preuve Barack Obama ? C’est sans hésitation et avec beaucoup d’assurance que Barack Obama a développé les relations militaires entre les Etats-Unis et Israël, le soutien majeur de l’Amérique dans la région. C’est sans hésitation que Barack Obama distille ses «bonnes paroles» aux Palestiniens pour les endormir et leur faire accepter la soumission à l’occupant israélien. C’est encore sans discrétion que Barack Obama raconte des balivernes lorsqu’il dit aux Israéliens «la vraie sécurité pour les Israéliens passe par la paix avec leurs voisins immédiats (…) c’est-à-dire par la création d’un Etat palestinien à leurs côtés

Ces «bonnes paroles» ne s’adressent même pas aux Etats arabes de la région, complices de leur protecteur américain. Elles s’adressent aux peuples de la région qui attendent toujours un geste des Etats-Unis (en faveur des Palestiniens), encore capables de faire la pluie et le beau temps au Proche et au Moyen-Orient. Mais, c’est depuis longtemps que les Etats-Unis ont choisi leur camp : celui des Israéliens, des Saoudiens, des Qataris, des Turcs et compères du même acabit. Autrement dit, celui des colonisateurs, des despotes, des dictateurs et réactionnaires de la région qui règnent à la baïonnette.

A entendre Alain Frachon, le voyage de Barack Obama au Moyen-Orient du 20 au 23 mars 2013 avait pour objectif d’«écouter, comprendre, gagner la confiance de l’opinion israélienne, pas pour imposer une feuille de route ni pour exercer des pressions sur le troisième gouvernement de Benyamin Nétanyahou (…) Le président américain n’exige plus l’arrêt, même temporaire, des implantations israéliennes en territoire palestinien, tout en les qualifiant d’obstacle à la paix.» C’est donc pour amadouer les Israéliens colonisateurs, les caresser dans le sens du poil, comme on caresse son subordonné, que Barack Obama s’est déplacé au Moyen-Orient. Il suivait des objectifs hautement plus stratégiques qui échappent à Alain Frachon, gagné par la «discrétion» du Prix Nobel de la Paix !

Ce qu’Alain Frachon ne COMPREND pas, c’est que c’est l’Amérique, Barack Obama compris, est le plus grand obstacle à la paix et à la création d’un Etat palestinien. Il a bien écrit que la «paix égypto-israélienne» de 1979 serait impossible si Jimmy Carter, le président américain, n’avait pas tordu le bras à Anouar El-Sadate et à Menahem Begin ? Car «Les Etats-Unis sont toujours la puissance de référence au ¨Proche-Orient, où leur déploiement militaire est sans équivalent.» Donc, si les Etats-Unis décidaient de l’établissement d’un Etat palestinien, Israël ne pourrait qu’OBEIR. CQFD !

Qui a-t-il, Barack Obama, envie d’«écouter», de «comprendre» ? Malgré ses services de renseignements pléthoriques, ne sait-il pas encore qu’un système de ségrégation à l’encontre des Palestiniens existe en Israël ? Ne sait-il pas encore que la colonisation illégale-oui hors la loi internationale !- et accélérée du territoire palestinien rend la création d’un Etat palestinien impossible ? Malgré ses services de renseignements pléthoriques, ne comprend-t-il pas qu’en Israël, il y a des routes séparées, des «barrières de sécurité», des check-points, des plaques d’immatriculations différentes, de cantonnement des zones délimitées ? Bref, un traitement raciste et inhumain des Palestiniens par l’Etat d’Israël ?

Barack Obama, Prix Nobel de la Paix, est complice d’un Etat ségrégationniste, d’apartheid et raciste qui, plus est, refuse d’appliquer les résolutions de l’ONU ; un Etat qui viole en permanence les lois internationales.

Il parait plus plausible de parler de l’ignorance de certains journalistes français qui «analysent» la situation du Moyen-Orient, depuis la terrasse des bistrots parisiens, au lieu d’aller voir sur place, d’«entendre» et d’«écouter» pour mieux «comprendre».